L’impact économique des congrès internationaux sur les villes hôtes

L’impact économique des congrès internationaux sur les villes hôtes

Au-delà des échanges intellectuels et des avancées diplomatiques qui ont marqué l’histoire, comme lors du célèbre Congrès de Berlin, les congrès internationaux modernes représentent une force économique considérable pour les villes qui les accueillent. J’ai toujours été fasciné par la capacité de ces rassemblements à transformer temporairement une ville, non seulement sur le plan culturel mais aussi, et surtout, sur le plan économique. Loin d’être de simples réunions, ils sont de véritables moteurs de développement local, injectant des revenus substantiels et dynamisant l’écosystème économique des territoires hôtes. L’industrie MICE (Meetings, Incentives, Conferences and Exhibitions) est devenue un secteur stratégique, dont l’impact mérite une analyse approfondie.

Les retombées directes : Dépenses et création de valeur immédiate

L’impact économique le plus visible des congrès internationaux réside dans les dépenses directes effectuées par les organisateurs et les participants. Les organisateurs investissent localement pour la logistique, la location des espaces, le personnel temporaire et les services techniques. Les participants, quant à eux, dépensent pour leur hébergement, la restauration, les transports locaux, les achats et les loisirs. Une étude américaine menée par l’Events Industry Council (EIC) a révélé des chiffres impressionnants : rien qu’aux États-Unis, les dépenses en nourriture et boissons pour les réunions atteignaient 48 milliards de dollars, et près de 50 milliards étaient dépensés en hébergement, générant 300 millions de nuitées annuelles. Fait intéressant, bien que les participants internationaux ne représentaient que 2% du total lors de ces événements américains en 2016, ils comptaient pour 11% des dépenses totales, soit 38 milliards de dollars, soulignant leur valeur économique particulièrement élevée pour les villes hôtes. Cette manne financière directe est cruciale. Pour prendre un exemple plus modeste mais tout aussi illustratif, l’organisation d’une conférence internationale sur l’éthique à Wentworth-by-the-Sea a généré des revenus via les frais d’inscription et a directement bénéficié à l’hôtel hôte grâce à des tarifs négociés encourageant les nuitées sur place.

Ces dépenses irriguent directement plusieurs secteurs clés de l’économie locale. L’hôtellerie et la restauration figurent logiquement parmi les principaux bénéficiaires. À Montréal, par exemple, les données de Tourisme Montréal montrent que les restaurants, l’hébergement, mais aussi les loisirs, les transports et les services de voyage profitent largement de l’afflux de visiteurs lors de grands événements. Une étude menée en Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur sur l’impact des festivals, dont les mécanismes économiques sont comparables à ceux des congrès, a révélé que les festivaliers dépensaient en moyenne 153 euros chacun dans les commerces locaux, injectant un total de 62,5 millions d’euros. Les organisateurs de ces festivals ont également dépensé près de 74 millions d’euros auprès de fournisseurs locaux. J’ai constaté que cette concentration des dépenses sur des secteurs spécifiques crée un pic d’activité bienvenu, souvent en dehors des saisons touristiques traditionnelles, contribuant ainsi à lisser l’activité économique annuelle de la ville. Pour en savoir plus sur cette étude régionale, consultez les résultats publiés par ARTCENA.

L’effet multiplicateur : Au-delà des dépenses initiales

L’impact économique ne s’arrête pas aux dépenses directes. Chaque euro dépensé par un congressiste ou un organisateur circule ensuite dans l’économie locale, créant ce que l’on appelle l’effet multiplicateur. Un hôtelier utilise ses revenus pour payer ses employés et ses fournisseurs locaux, qui à leur tour dépensent cet argent dans d’autres commerces de la ville. Cette circulation de l’argent amplifie l’impact initial. L’étude américaine de l’EIC estime même que chaque dollar investi dans l’organisation de réunions physiques génère un retour de 1,60 dollar pour l’économie américaine, soit un retour sur investissement de 160%. Ce phénomène se traduit aussi par la création ou le maintien d’emplois. L’étude en Région Sud a chiffré l’impact à 626 emplois équivalents temps plein au niveau local pour huit festivals. À l’échelle mondiale, l’industrie des événements d’affaires soutient des millions d’emplois et contribue de manière significative au PIB mondial, estimé à 1,5 billion de dollars selon certaines analyses, comme celles de Risalat Consultants.

Au-delà des emplois et de la stimulation de l’activité, les congrès génèrent des recettes fiscales non négligeables pour les collectivités locales et les gouvernements nationaux. Aux États-Unis, le secteur des réunions et événements génère 104 milliards de dollars en taxes fédérales, étatiques et locales. À Montréal, bien que les retombées fiscales directes pour la ville proviennent principalement des taxes foncières (potentiellement accrues autour des lieux d’événements) et des revenus des services municipaux (parking, transports), ce sont surtout les gouvernements provincial (Québec) et fédéral (Canada) qui bénéficient des taxes sur la valeur ajoutée (TVQ, TPS) et des impôts sur le revenu générés par l’activité économique accrue. Une étude du Regroupement des évènements majeurs internationaux (RÉMI) à Montréal a estimé que 17 grands événements avaient généré 49,3 millions de dollars en recettes fiscales pour le Québec et 17,3 millions pour le gouvernement fédéral en 2018. De même, une analyse menée en Hongrie par le Bureau des Congrès Hongrois a projeté une augmentation du PIB de 157 milliards de forints entre 2019 et 2023 grâce aux seuls congrès d’associations, soulignant l’impact macroéconomique substantiel.

Attractivité et développement territorial : Les bénéfices à long terme

Accueillir des congrès internationaux n’est pas seulement une question de retombées financières immédiates. C’est aussi un investissement dans l’image et l’attractivité à long terme de la ville. Ces événements placent la ville hôte sous les projecteurs internationaux, agissant comme une véritable vitrine, comme le souligne Tourisme Montréal. Une expérience positive pour les congressistes peut les inciter à revenir en tant que touristes, à recommander la destination ou même à envisager d’y investir ou d’y travailler. J’ai souvent observé comment la tenue régulière de congrès prestigieux dans une ville renforce sa réputation dans des domaines spécifiques (scientifique, technologique, culturel…), attirant ainsi talents et entreprises.

Bien que l’impact sur les infrastructures soit généralement moins spectaculaire que pour des méga-événements comme les Jeux Olympiques, la nécessité d’accueillir des congrès de grande envergure peut néanmoins stimuler des améliorations ciblées. La construction ou la rénovation de centres de congrès, le développement de l’offre hôtelière de qualité ou l’amélioration des liaisons de transport vers les lieux d’événements sont des exemples d’investissements qui bénéficient à la ville bien au-delà de la tenue des congrès eux-mêmes. La présence accrue de visiteurs et d’activités peut également contribuer, dans certains cas, à une augmentation de la valeur immobilière dans les quartiers concernés, générant potentiellement des revenus fiscaux supplémentaires pour la municipalité.

Enfin, il ne faut pas négliger les bénéfices immatériels. Les congrès sont des lieux d’échange de connaissances, de réseautage et d’innovation. Accueillir ces événements facilite l’accès des acteurs locaux (chercheurs, entrepreneurs, étudiants) à des réseaux internationaux et aux dernières avancées dans leur domaine. Cet aspect, bien que difficilement quantifiable en termes économiques directs, contribue au dynamisme intellectuel et à la compétitivité à long terme du territoire. L’étude hongroise mentionnait d’ailleurs la prise en compte des impacts sur la productivité et le transfert de connaissances dans son modèle d’analyse.

Les défis et considérations stratégiques pour les villes hôtes

Si les bénéfices économiques sont indéniables, attirer et organiser des congrès internationaux représente un investissement significatif pour les villes hôtes. Les coûts liés à la construction ou à la maintenance des infrastructures d’accueil, aux subventions parfois nécessaires pour attirer les événements (comme mentionné pour les événements montréalais), et aux efforts de marketing et de promotion sont considérables. Une planification stratégique rigoureuse est donc essentielle pour s’assurer que les retombées économiques justifient l’investissement public et privé, et pour optimiser la répartition de ces bénéfices au sein de la communauté locale.

Un autre défi majeur réside dans la capacité de la ville à accueillir un afflux important de visiteurs sans perturber excessivement la vie quotidienne de ses habitants et sans saturer ses infrastructures (transports, sécurité, gestion des déchets). La gestion des flux, la coordination entre les différents acteurs (organisateurs, autorités locales, prestataires de services) et la communication avec la population locale sont cruciales pour assurer le succès et l’acceptabilité de ces événements. De plus, la concurrence entre les villes pour attirer les congrès est féroce, nécessitant une offre attractive et différenciée.

Enfin, l’accessibilité de la destination est un facteur absolument critique. Cela inclut non seulement les infrastructures de transport, mais aussi les politiques d’accueil, notamment en matière de visas. Des politiques trop restrictives peuvent dissuader la participation internationale, privant ainsi la ville hôte d’une part substantielle des retombées économiques potentielles. L’exemple américain, rapporté par FCM Travel, des pertes économiques estimées suite à des restrictions de voyage souligne l’importance capitale de projeter une image d’ouverture et de faciliter la venue des congressistes internationaux. Assurer une expérience fluide et accueillante dès l’arrivée est fondamental.

Bien plus qu’une rencontre : Les congrès comme catalyseurs de prospérité urbaine

En définitive, l’accueil de congrès internationaux transcende largement la simple organisation d’événements. C’est une stratégie de développement économique à part entière, capable de générer des revenus directs substantiels, de stimuler l’emploi local grâce à l’effet multiplicateur, et de renforcer l’attractivité et le rayonnement d’une ville sur le long terme. Les chiffres parlent d’eux-mêmes, qu’il s’agisse des milliards injectés dans les économies nationales ou des emplois créés localement. Cependant, maximiser ces retombées exige une vision stratégique, des investissements ciblés et une politique d’accueil favorable. À mon avis, les villes qui comprennent et exploitent pleinement le potentiel économique des congrès ne se contentent pas d’accueillir des visiteurs ; elles investissent activement dans leur propre avenir économique, social et culturel, transformant ces rencontres éphémères en catalyseurs durables de prospérité.

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nisarg